Article parue dans "El Paîs" du 24/11/2016. La traduction est personnelle et donc ...
Ceci dit, à l'époque où on se pose des questions pour 58 naufragés de la Méditerranée, ça laisse rêveur.
Raphaël Poch, Paris. Correspondant de "El Païs" 24/11/2016 02:23 | Actualisé à 24/11/2016 07:33
certains à peines en état de naviguer, arrivaient à La Rochelle. Entre juin et septembre 1937 environ 125.000 Espagnols sont arrivés à la France. En 1939 l'exode a atteint quelques centaines de milliers. Dans cet exode 21.000 personnes sont arrivées en Bretagne entre 1937 et 1939, une vague sans précédents aux XIXe et XXe siècles dans cette région assez fermée sur elle même, hostile à toute guerre et toujours traumatisée par les boucheries de 1914-1918. L'historienne Isabelle Le Boulanger, de Centre de Recherche Bretonne et Celtique de Brest, a enquêté durant plus de trois ans sur tout ce que ce mouvement publiés a laissé sur papier : 104 liasses conservées dans les archives des cinq départements bretons, la presse de l'époque et de documents comme des journaux de l'écrivain breton Louis Guillot, un responsable du Secours Rouge dans cette zone. Le résultat a été le livre L'exil espagnol en Bretagne, 1937-1940 (l'exil espagnol en Bretagne). L'analogie avec les drames et les hontes de l'actuelle Europe devient irrésistible. "Aujourd'hui l'arrivée de 600 migrantes nous est annoncée en Bretagne : ils ne sont pas tout à fait comparables aux 15.000 réfugiés espagnols arrivés en février durant la" retirada", et il ne devrait pas susciter un débat . Quand un peuple fuit de la guerre, notre devoir est de l'accueillir, la France doit être à la hauteur de sa réputation de terre d'asile". La presse de droite sonnait alors terrible : "Tous les Espagnols sont plus anarchistes que républicains et surtout maintenant, quand la Guerre Civile déchaîne des instincts terribles aux deux côtés, elles ne sont déjà plus que des bêtes féroces entrainées au massacre, le viol et le pillage qu'ils arrivent avec les mains pleines de sang et l'âme est plein d'une rage", annonçait Le Dépêche de Brest, le 3 octobre 1936. Mais la République française, au contraire de l'Allemagne et L'Italie des fascistes a militairement abandonné ses parents politiques espagnols, s'est acquittée de son devoir d'accueil. "En 1937, le gouvernement du Front Populaire a été très favorable aux réfugiés espagnols, a fait le maximum pour les accueillir de la meilleure manière possible", explique Le Boulanger. "La situation s'est détériorée après la chute du Front Populaire en avril 1938, le nouveau gouvernement radical était très anticommuniste et n'a pas montré de grande empathie vers les républicains espagnols". Après le 10 mai 1940, les propres Français du nord-est ont été réfugiés devant l'avance allemande, "une priorité leur a été donnée et les Espagnols ont payé le prix". Par rapport aux organisations de gauche – plus communistes que les socialistes-, "elles ont apporté aux réfugiés tous les produits qui ne pouvaient pas être assumés par les subventions de l'État (200 millions de francs par mois en 1939); des vêtements, des chaussure, des produits d'hygiène, du matériel de puériculture, etc.. Elles ont aussi organisé des colonies de vacances pour les enfants. À cette aide aussi des secteurs catholiques ont participé ", explique l'historienne, qui résume ainsi dans son livre l'attitude générale :" En face d'une minorité active et solidaire par des convictions politiques ou religieuses, une majorité silencieuse et passive manifeste malgré tout peu d'hostilité à sa présence ". En 1939, la guerre de l'Espagne a fini. En attendant la machine à fusiller travaille à plein rendement en Espagne, la propagande franquiste aussi : "Notre pays est ouvert à tous les Espagnols qui n'ont pas de crime qui leur soit reproché (…) personne ne croit en la légende de la répression espagnole ", signale une proclamation du gouvernement fasciste publiée dans L'Ouest-Éclair le 13 septembre. Devant les pressions pour qu'ils reviennent à leur pays, les réfugiés allèguent trois raisons pour ne pas le faire : la peur des représailles, une recherche de parents en France ou dans son pays et attente de nouvelles de ceux-là, pour être décidé, et en troisième lieu je désire rester considérant que je n'ai pas d'avenir en Espagne et pour des conditions les plus favorables de vie sont en France. En général les préfets prennent en compte l'appartenance d'un réfugié à un parti politique républicain pour l'exclure de la liste des rapatriés. Le Boulanger a trouvé ce qu'elle qualifie de "malheureuses exceptions". Par exemple, le cas d'un avocat de Gauche Républicaine qui allègue que ses biens ont été confisqués par les franquistes. Dans une démonstration d'ignorance ou de mauvaise foi, le préfet note dans son dossier que "sa profession d'avocat le protège c'est pourquoi il doit revenir dans son pays", comme si l'Espagne des exécutions sommaires était un État de droit